Note d'intention








 Initiateur de ce projet, j’ai travaillé au studio Evernew Pictures de Lahore à la fin des années 90. Ingénieur du son sur un long-métrage qui ne vit jamais le jour, j’ai fait connaissance de techniciens, réalisateurs et producteurs d’un cinéma sur le déclin. L’âge d’or et les nombreux succès populaires semblaient déjà loin à cette période : d’un cinéma éclectique, riche d’une diversité de thèmes et de traitements, le cinéma Pakistanais a glissé vers des formes de divertissement de plus en plus outrancières et rustres.

 Après des journées de tournage éprouvantes, je découvrais le soir dans les salles obscures un septième art qui ne s’était jamais vu exporté hors de ses frontières. Simples, brutaux et excessifs, ces films m’apparaissaient pour autant inventifs et surprenants. Destinés aux populations rurales et "urbaines-populaires", ces fictions m’exaltaient également. Je prenais plaisir dans ces salles obscures à huer les méchants, applaudir les héros et siffler les filles à l’écran en choeur avec le public agité.

 Dans les années suivantes a mûri en moi le désir de connaître mieux cette culture, cette société, ce cinéma. Je suis revenu par deux fois à la fin des années 2000, au Pays des Purs pour réaliser un documentaire sur le cinéma Pakistanais: « FINAL CUT AU PAKISTAN » qui a été diffusé par Ciné Cinéma et TV5 monde. De tournages tumultueux en salles de cinéma agitées, ce film donne à découvrir une société, ses modes de vie et ses mutations, loin des clichés et des fantasmes occidentaux. L’univers des cinéastes sert de prisme pour appréhender une nation méconnue. Ce documentaire est aujourd’hui au catalogue « image de la culture » du CNC.

  De ces divers séjours, j’ai ramené une quantité importante de films qui se trouvent être libres de droit, sans droits d’exploitation: Je propose aujourd’hui un concept de ciné concert dans une forme libre. Sans intention de caricaturer ou de tourner en ridicule un cinéma très loin des conventions et normes du septième art occidental, il s’agit de (re) donner vie, sous une nouvelle forme, à des images inconnues.

 Le projet consiste donc à re-créer cet esprit de fête qui existait dans les salles de cinéma pakistanaises (Aujourd’hui souvent vidées par la crise ou la peur des attentats). Le temps d’une soirée, un montage condensé, rendra l’énergie et les intentions présentes dans ce cinéma sans en dévoyer l’intention d’origine. Si lors de ces ciné-concerts, le public se lève de son siège et conspue en rythme les mauvais garçons et acclame en chœur le héros vengeur, alors l’expérience sera réussi.

 La musique, jouée en direct, pleine de liberté, d’exubérance, aura pour finalité de transporter le spectateur, de l’exalter pour qu’il connaisse lui aussi d’une certaine façon l’expérience cinématographique du pays des purs.

 Ce ciné-concert apportera donc un éclairage nouveau sur un pays réduit le plus souvent à ses seuls problèmes dans nos medias.


Jérôme Florenville